“The Right to Indifference”?
“The Right to indifference” — is how the French daily Libération‘s editor Laurent Joffrin interprets the results of a recent poll which, he says, proves wrong both the far-right (& their spectre of imminent holy war between Muslims & Christians decimating Europe) and the communitarian Left, (who claim that because of the past — & present? — colonial attitudes of Europeans, Muslims feel very unwelcome and ill at ease in Europe). The poll suggests that among the 10500 people interviewed, the vast majority (76%) of immigrants and their children show “a level of confidence in (their respective European countries’) democratic institutions very much higher than among the general population” and have a strong attachment to these countries. Here, below, Joffrin’s editorial, in which he further quips that rather than the “droit a la différence — the right to difference, or the right to be different” many people are more liable to demand a “right to indifference,” i.e. the right to get on with their lives and be simply part of the population, even if there are obviously complaints about acts of discrimination. :
Intégrés, les musulmans ? Oui
C’est une bonne nouvelle : on en parlera très peu. L’Agence européenne des droits fondamentaux a organisé un sondage dans les pays de l’Union auprès de 10500 personnes s’identifiant comme musulmanes. Les résultats obtenus dérangeront beaucoup de monde : les populistes xénophobes qui nous parlent du «grand remplacement» (des chrétiens par les musulmans) ou agitent dans leur paranoïa le spectre d’une prochaine guerre civile entre les musulmans et les autres, tels des journaux comme Valeurs actuelles et quelques autres feuilles d’extrême droite ; mais ils gêneront aussi, sur la frange symétrique, les théoriciens irresponsables du mouvement «décolonial» et les militants communautaires agressifs comme le Parti des indigènes de la République (PIR) et quelques autres. Alors que les uns et les autres postulent que les musulmans s’intègrent très mal aux pays où ils résident, soit parce qu’ils cultiveraient leur particularisme, soit parce qu’ils se révolteraient contre la «domination coloniale» dont ils seraient l’objet, les réponses données par cet échantillon nombreux et transnational invalident d’un coup deux thèses qui se regardent en chiens de faïence. En fait, les immigrés et leurs enfants originaires de pays musulmans manifestent «un degré de confiance dans les institutions démocratiques qui est bien plus élevé que dans la population en général». Autrement dit, les musulmans croient plus aux promesses républicaines – ou démocratiques – que les non-musulmans. Quelque 76% des personnes interrogées ressentent un attachement fort au pays où elles résident. Elles témoignent même un peu plus que les autres Européens de leur confiance envers la justice et la police…
Diable ! Voilà qui devrait troubler toutes sortes de préjugés. Difficile, tout de même d’y voir autre chose que de la volonté – générale chez les immigrés et leurs enfants ou petits-enfants, dans tous les pays – de se fondre dans la population autochtone et de vivre pacifiquement comme tout un chacun, en réclamant non un droit à la différence mais un droit à l’indifférence. D’autant qu’une autre enquête, menée par la fondation allemande Bertelsmann auprès d’un large échantillon et publiée au début de septembre, aboutissait à des résultats très comparables. Ce qui ne veut pas dire que tout va bien dans le meilleur des mondes européens : les mêmes se plaignent évidemment des discriminations dont ils sont victimes. Mais ils croient toujours que les démocraties de l’Union sauront, un jour ou l’autre, y remédier en mettant en œuvre leurs propres principes. Bref, les musulmans, quoique soumis à un traitement injuste, mais confiants dans les pays dont ils sont devenus des citoyens aussi civiques que les autres, pensent que les pays d’Europe leur rendront un jour justice. Voilà qui gênera beaucoup de gens. Voilà qui ne fera pas la une du Figaro. Mais rassurons-nous : les militants des deux bords, confits de certitude, éviteront soigneusement d’en tenir compte. Et même de le lire…